Coûts de santé et prix des médicaments: éclaircissements - Interpharma

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21 octobre 2022

Coûts de santé et prix des médicaments: éclaircissements

L’augmentation des coûts de santé est un sujet important et le prix des médicaments est alors souvent en point de mire. Mais pour évaluer correctement les coûts réels, la base de calcul joue un rôle décisif. Nous apportons des éclaircissements en nous appuyant sur les chiffres de l’Office fédéral de la statistique.

La population suisse apprécie la haute qualité des prestations sanitaires. Elle tient à la conserver, de même que le large catalogue des prestations de l’assurance de base et des assurances complémentaires. Mais de hautes exigences posées au système de santé: toujours plus de prestations, meilleures, tout ceci a un prix. Les coûts sont donc, à juste titre, l’aspect du système de santé qui fait le plus débat. Mais il ne faut pas oublier que des affirmations et calculs sérieux ne sont possibles que sur la base de données robustes et pertinentes. Interpharma se réfère donc aux chiffres de l’Office fédéral de la statistique (OFS), le centre de compétence national pour les statistiques publiques de la Suisse.

Les médicaments représentent 12 francs de dépenses de santé sur 100

D’après les chiffres définitifs les plus récents de l’OFS, en 2020, les dépenses totales effectuées en Suisse pour le système de santé se sont montées à 83.3 milliards de francs, soit une croissance de +1% par rapport à 2019, inférieure à la tendance des années précédentes. La majeure partie des coûts, environ deux tiers, sont financés par les assurances sociales et les pouvoirs publics (Confédération, cantons, communes). Environ un cinquième sont directement à la charge des ménages privés. Près de deux tiers des coûts de santé, donc la plus grande partie, sont occasionnés par les traitements curatifs ambulatoires (24.2%), stationnaires (19.5%) et les soins de longue durée (20.7%). Les médicaments représentent quant à eux 11.7% de l’ensemble des dépenses de santé (9.7 milliards de francs).

La part des médicaments aux coûts de santé est stable depuis plus de dix ans

En 2020, leur part aux coûts de l’assurance obligatoire des soins (AOS) était de 21%. La part des médicaments aux coûts de l’AOS est plus élevée que leur part aux coûts globaux, car contrairement à d’autres groupes de prestations (par exemple aux traitements curatifs stationnaires), environ trois quarts des médicaments sont financés par le biais de l’assurance-maladie. Si on observe tout le «gâteau» (cf. graphique ci-dessus), on voit que la part des médicaments de 11.7% aux coûts de santé en 2020 n’était certes pas négligeable, mais pas non plus dominante. On peut donc dire que sur 100 francs dépensés dans le système de santé, un peu moins de 12 le sont pour des médicaments. L’évolution dans le temps montre en outre clairement que la part des médicaments aux coûts de santé est stable depuis de nombreuses années.

Le prix des médicaments n’est pas un moteur de cherté du système de santé

Le tableau est légèrement différent pour d’autres prestations du système de santé. Au cours des dix dernières années, les coûts de santé ont augmenté en moyenne de +2.9%. Les dépenses en médicaments ont augmenté de +2.5%, donc moins que les coûts de santé dans leur ensemble, ceci bien que de nombreux médicaments innovants soient arrivés sur le marché. Ce sont surtout des domaines comme la prévention et les services auxiliaires (p. ex. laboratoires, transports) qui enregistrent une forte hausse.

Depuis l’introduction de la LAMal, l’indice des prix des médicaments a baissé de 44%

L’indice des prix des médicaments est en outre le seul indice des prix du système de santé qui baisse régulièrement depuis l’introduction de la loi sur l’assurance-maladie (LAMal) en 1996. En 2021, l’indice des prix était de 56 points, soit de 44% inférieur à ce qu’il était en 1996, tandis que l’indice des prix hospitaliers, par exemple, a augmenté d’environ 11% depuis 1996. Les prix des médicaments pris en charge par les caisses-maladie sont contrôlés tous les trois ans et baissés le cas échéant, ce qui aboutit, année après année, à des économies de plus de 1.2 milliard de francs dans le système de santé. Comparée aux autres acteurs du système de santé, la branche pharmaceutique contribue ainsi aux économies dans des proportions supérieures à la moyenne.

Digression: les médicaments peuvent faire baisser les coûts de santé

Dans le débat parfois très unilatéral sur les coûts de santé, on oublie souvent que les médicaments ne sont pas juste un facteur de coûts pour le système de santé, mais peuvent aussi générer toutes sortes de bénéfices. Là encore, il est donc utile de faire un pas en arrière pour observer le tableau dans son ensemble. Certes, les maladies pèsent en premier lieu sur les personnes malades, mais il y a souvent encore d’autres personnes concernées: les assureurs-maladie supportent les coûts des traitements médicaux, les employeurs déplorent des pertes de productivité et l’environnement personnel du patient ressent aussi les conséquences de la maladie. On peut donc distinguer les coûts directs (traitements médicaux et non médicaux), les coûts indirects (pertes de ressources, par exemple la main-d’œuvre qui manque pour cause de maladie) et les coûts intangibles (réduction de la qualité de vie). La somme représente les frais entraînés par la maladie pour la société.

Les médicaments innovants peuvent avoir un impact sur les trois types de coûts: ainsi une innovation fait-elle en général augmenter les coûts de traitement directs, tandis que les coûts indirects et intangibles diminuent. En effet, si les patient-e-s vont mieux, voire guérissent, leur qualité de vie s’améliore et, bien souvent, ils reviennent plus rapidement sur le marché du travail, ce qui décharge les assurances sociales. On peut donc s’attendre à ce qu’un médicament innovant fasse diminuer au final le «gâteau» de coûts que la maladie génère pour les personnes touchées et pour l’ensemble de la société. Cela veut dire que les coûts de la maladie baissent au total pour la société. Du point de vue économique global, il est donc décisif de savoir si le nouveau traitement fait baisser l’ensemble des frais de maladie. L’évolution de la composition de l’ensemble des coûts est accessoire.

Une étude de la Columbia University publiée en 2022 a montré, à partir de l’exemple de la Suisse, que les nouveaux médicaments innovants ont effectivement un impact sur les trois types de coûts. Lichtenberg (2022) analyse le rapport entre les innovations pharmaceutiques et les décès précoces dus à des maladies ainsi que les hospitalisations. Les résultats montrent que les nouveaux médicaments innovants ont en Suisse une association négative avec la mortalité précoce et due à des maladies. Le rapport entre les innovations pharmaceutiques et les séjours hospitaliers ainsi que la durée des séjours à l’hôpital est lui aussi négatif, ce qui fait faire des économies importantes au système de santé suisse.

Conclusion: en particulier dans le débat sur les coûts de santé, il est utile d’observer l’ensemble du tableau, et pas seulement des détails isolés. Les médicaments ne sont pas les moteurs de cherté du système de santé, bien au contraire, ils aident même à réduire les coûts pour la société. Les cercles politiques seraient bien avisés d’élargir leur perspective au-delà des seuls coûts et de mener enfin un débat basé sur les bénéfices.

Source: Lichtenberg, Frank (2022): The association between pharmaceutical innovation and both premature mortality and hospital utilization in Switzerland, 1996–2019. Swiss Journal of Economics and Statistics (2022), 158:7.

Concrètement, les médicaments mis sur le marché en Suisse entre 1990 et 2011 ont réduit d’environ un tiers la mortalité des personnes âgées de moins de 85 ans. Lichtenberg (2022) montre aussi que les innovations pharmaceutiques mises sur le marché entre 1994 et 2010 ont permis aux habitant-e-s de passer plus de deux millions de journées en moins à l’hôpital (exemple de 2019). Cette même année, les économies réalisées grâce à cette réduction des hospitalisations se montent à plus de trois milliards de francs, ce qui soulage grandement, non seulement le système de santé suisse, mais aussi les patient-e-s de notre pays.

Bilan: les apparences sont trompeuses. Une hausse des coûts visibles et directs réduit l’ensemble des coûts à la charge de la société.

Michèle Sierro

Responsable communication Suisse romande

+41 79 305 84 30

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