Avec le 2e volet de mesures visant à maîtriser les coûts (volet 2), le Conseil fédéral entend freiner l’évolution des coûts de la santé. Or, bon nombre des mesures proposées vont surtout à l’encontre de la qualité et de l’approvisionnement du système de santé. Les problèmes de grande ampleur en matière d’accès des patient-e-s aux médicaments ne sont en outre toujours pas abordés. À travers une série de blogs en trois parties, Interpharma analyse le volet 2 et formule les améliorations dont il a grand besoin.
Dans le 1er épisode de cette série de blogs, nous avons montré que le secteur pharmaceutique apportait d’ores et déjà une contribution supérieure à la moyenne pour maîtriser les coûts de la santé et expliqué pourquoi le secteur est prêt à soutenir les modèles de prix prévus par le volet 2. Dans le 2e épisode, nous avons montré pourquoi il est malavisé d’opposer objectifs de coûts et objectifs de soins ou de qualité dans le système de santé et pointé où se situe le véritable besoin d’agir, à savoir l’accès des patient-e-s.
Avec le 2e volet de mesures visant à maîtriser les coûts, le Conseil fédéral a en effet manqué une nouvelle occasion d’améliorer enfin l’accès aux médicaments en Suisse, alors même qu’Interpharma a mis sur la table une solution constructive et réalisable il y a déjà plusieurs mois de cela. À ce jour, le Conseil fédéral n’est manifestement pas prêt à permettre une mise en œuvre viable dans les meilleurs délais. Bien au contraire: le rapport entre les coûts, la qualité et la sécurité des soins semble devoir pencher davantage encore en faveur des coûts.
Après que l’introduction du principe du prix avantageux au niveau de la loi (par le biais de la norme de délégation à l’art. 32, al. 3) a été sévèrement critiquée, le Conseil fédéral veut maintenant renoncer à une définition des «Principes de calcul d’une rémunération aussi avantageuse que possible» au niveau de la loi. Il considère que la loi contient déjà suffisamment de dispositions et que les principes peuvent être développés au niveau de l’ordonnance.
Interpharma ne partage pas cet avis: nous pensons au contraire que la loi n’offre pas de base à des principes de prix avantageux au niveau de l’ordonnance, car l’art. 43, al. 6 mentionne la qualité, l’adéquation et les coûts sur un pied d’égalité.
Qu’est-ce que cela signifie concrètement? Contrairement à ce qu’il affirme, le Conseil fédéral veut introduire par la petite porte le principe du prix le plus avantageux. Or ce principe du prix le plus bas est clairement en contradiction avec la LAMal et la volonté du législateur: se concentrer uniquement sur les coûts va à l’encontre de la volonté de la population, maintes fois exprimée, d’un système de santé de haute qualité, accessible rapidement à toutes et à tous à égalité (cf. Moniteur de la santé et fig. 4). Le fait d’ancrer une modification d’une telle importance dans l’ordonnance en contournant le Parlement est extrêmement problématique et inacceptable du point de vue de la politique nationale et peut être qualifié de tour de passe-passe.
Cela aurait pour effet de décaler unilatéralement en direction des coûts l’équilibre inscrit dans la LAMal entre les coûts, la qualité et la sécurité d’approvisionnement. Bien que la LAMal indique que les objectifs de haute qualité et d’adéquation des soins ainsi que du caractère économique sont considérés sur un pied d’égalité, le Conseil fédéral veut privilégier l’objectif des coûts avantageux. L’OFSP obtient de fait un blanc-seing pour comparer de nouveaux médicaments très innovants avec des préparations obsolètes sur le plan technologique, et donc moins chères, sans avoir à tenir compte de la qualité. Cette proposition mène en définitive au principe du prix le plus bas si bien que la préférence ne va pas au meilleur produit, mais à celui le moins cher. Par analogie, c’est comme si l’État tenait le raisonnement suivant: au lieu d’acheter un smartphone de dernière génération, il faudrait acheter un vieux téléphone fixe parce que cette solution est moins onéreuse et qu’après tout, on peut téléphoner avec les deux, ce qui est le critère décisif. Il en résulterait des décisions arbitraires des autorités et un climat d’incertitude plutôt que des décisions fondées sur la science et basées sur le service rendu. Cela finit par mettre en péril l’approvisionnement en nouveaux médicaments de haute qualité.
Or, cette façon de faire n’est pas seulement «malhonnête» sur le plan politique, elle est surtout dangereuse, car la qualité des soins de santé pour la population suisse pâtirait inévitablement d’un tel régime de primauté des coûts. Il s’agit là d’une politique menée sur le dos des patientes. Il est urgent que le Parlement apporte des améliorations et se porte garant de la qualité et de la sécurité des soins en Suisse. Interpharma reste constructive et disposée à un examen différencié des prix, mais pas dans le sens d’un principe du prix le plus avantageux qui se ferait finalement au détriment des patient-e-s. Nous en appelons maintenant au Parlement, qui doit fixer le cadre.
[1] Source : Message concernant relatif à la modification de la loi fédérale sur l’assurance-maladie (mesures visant à freiner la hausse des coûts – 2e volet)
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